lundi 2 octobre 2023

Bioctobre 2020 - jour 2 : Wisp

Ce billet est une pré-publication du tome 2 de Bioctobre 2020-2021, autour du mot clé "Wisp": Brin.
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 Planche N°II                                #Wisp

Brin

En apparence, quoi de plus anodin qu’un vulgaire brin d’herbe, et en même temps, quoi de plus poétique que la « petite brize », également désignée sous le nom de « petite amourette » ou encore d’« herbe tremblante » ? Étymologiquement, cette espèce tire indirectement son nom du grec ancien « brízô » signifiant dodeliner de la tête, mais le riz « oryza » et la brise venteuse ne sont pas loin. 

Briza minor

     À la belle saison, chaque tige porte de nombreux petits grelots qui oscillent légèrement dans le vent, la pointe vers le bas. Chacun de ces « épillets » est en réalité composé d’une bonne dizaine de fleurs emboitées et comprenant trois étamines et deux pistils plumeux. Les étamines longues et pendantes dispersent dans le vent quantité de grains de pollen qui iront avec un peu de chance se fixer sur les pistils d’une autre fleur plus mature. À l’issue de la fécondation par le pollen, cette plante annuelle produira des graines à l’origine de nouveaux brins d’herbe au printemps suivant… Cette dispersion du pollen par le vent caractérise les fleurs anémophiles : littéralement « qui aiment le vent ». Ainsi à l’opposé des fleurs entomophiles, nul besoin de fleurs colorées, odorantes ou riche en nectar pour attirer les pollinisateurs : le vent seul fera le travail, n’en déplaise aux allergiques dont je fais partie. En plus de cette reproduction par les graines, la petite brize peut aussi se multiplier grâce à son rhizome, une portion de tige souterraine capable de se ramifier pour donner d’autres tiges aériennes. Voilà comment les « herbes », si frêles soient-elles, sont capables de coloniser très rapidement de nombreux milieux.  
 
Des épillets contenant chacun plusieurs fleurs.
 
     Aujourd’hui, les herbes poussent partout, mais c’est en réalité un événement relativement récent à l’échelle des temps géologiques. En effet, la famille des poacées — autrefois des « graminées » — n’a conquis le globe qu’à partir de la fin du Crétacé (- 70 millions d’années), soit peu de temps avant l’extinction des dinosaures (non-aviens). C’est alors une transformation radicale des paysages qui s’opère avec l’avènement des prairies herbacées, au détriment des mousses, et des fougères notamment. Aujourd’hui, les poacées comprennent 12 000 espèces d’herbes : des bambous géants à notre petite amourette, en passant par l’ensemble des céréales (blé, riz, maïs…). En plus de nourrir l’humanité et son bétail, les poacées constituent sous forme de gazon, le « standard » du sol végétalisé, supportant le piétinement des footballeurs, ou l’atterrissage des balles de golf. Malgré cela l’humanité n’a de cesse de réguler ou d’empêcher leur croissance à cout de tondeuses, d’herbicides, ou d’enrobés bitumineux… Concluons qu’avec les herbes, bonnes ou mauvaises, c’est un peu « je t’aime, moi non plus », soit un peu plus qu’une petite amourette passagère.
 
 
Une prairie couverte de prêles (Equisetales), des plantes actuelles assez proches des fougères importantes avant la domination des poacées.

 
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