Ce billet est une pré-publication du tome 2 de Bioctobre 2020-2021, autour du mot clé "Wisp": Brin.
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Planche N°II #Wisp
Brin
En apparence, quoi de plus anodin qu’un vulgaire brin d’herbe, et en même temps, quoi de plus poétique que la « petite brize », également désignée sous le nom de « petite amourette » ou encore d’« herbe tremblante » ? Étymologiquement, cette espèce tire indirectement son nom du grec ancien « brízô » signifiant dodeliner de la tête, mais le riz « oryza » et la brise venteuse ne sont pas loin.
Briza minor |
À la belle saison, chaque tige porte de nombreux petits
grelots qui oscillent légèrement dans le vent, la pointe vers le bas. Chacun de
ces « épillets » est en réalité composé d’une
bonne dizaine de fleurs emboitées et comprenant trois étamines et deux pistils
plumeux. Les étamines longues et pendantes dispersent dans le vent quantité de
grains de pollen qui iront avec un peu de chance se fixer sur les pistils d’une
autre fleur plus mature. À l’issue de la fécondation par le pollen, cette
plante annuelle produira des graines à l’origine de nouveaux brins d’herbe au
printemps suivant… Cette dispersion du pollen par le vent caractérise les fleurs
anémophiles : littéralement « qui
aiment le vent ».
Ainsi à l’opposé des fleurs entomophiles, nul besoin de fleurs colorées,
odorantes ou riche en nectar pour attirer les pollinisateurs : le vent
seul fera le travail, n’en déplaise aux allergiques dont je fais partie. En
plus de cette reproduction par les graines, la petite brize peut aussi se
multiplier grâce à son rhizome, une portion de tige souterraine capable de se
ramifier pour donner d’autres tiges aériennes. Voilà comment les « herbes », si frêles soient-elles,
sont capables de coloniser très rapidement de nombreux milieux.
Aujourd’hui, les herbes poussent partout, mais
c’est en réalité un événement relativement récent à l’échelle des temps
géologiques. En effet, la famille des poacées — autrefois des « graminées » — n’a conquis le globe
qu’à partir de la fin du Crétacé (- 70 millions d’années), soit peu
de temps avant l’extinction des dinosaures (non-aviens). C’est alors une
transformation radicale des paysages qui s’opère avec l’avènement des prairies
herbacées, au détriment des mousses, et des fougères notamment. Aujourd’hui,
les poacées comprennent 12 000 espèces
d’herbes : des bambous géants à notre petite amourette, en passant
par l’ensemble des céréales (blé, riz, maïs…). En plus de nourrir l’humanité et
son bétail, les poacées constituent sous forme de gazon, le « standard »
du sol végétalisé, supportant le piétinement des footballeurs, ou l’atterrissage
des balles de golf. Malgré cela l’humanité n’a de cesse de réguler ou
d’empêcher leur croissance à cout de tondeuses, d’herbicides, ou d’enrobés
bitumineux… Concluons qu’avec les herbes, bonnes ou mauvaises, c’est un peu « je t’aime, moi non plus », soit un peu plus qu’une
petite amourette passagère.
Une prairie couverte de prêles (Equisetales), des plantes actuelles assez proches des fougères importantes avant la domination des poacées. |
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