jeudi 6 avril 2023

Bioctobre 2019 - jour 3 : Appât

Avant un nouvel extrait de Bioctobre, une petite info :
Je présenterai demain vendredi 7 avril 2023 une conférence sur la faune abyssale. (17h30 - Amphi 150 Droit - UPPA campus de Pau).
Infos et résumé ici : https://utla.univ-pau.fr/site/?p=6051
 
Ce billet est issu de la planche du livre Bioctobre 2018-2019, autour du mot clé "Bait": Appat.
Pour en savoir plus sur le livre et se le procurer rendez-vous sur cette page : Bioctobre 2018-2019 : Le livre
 

Planche N°XXXIV                                                  #Bait

 - Appât -

     Peut-on pêcher sans appât? L’observation de la mallette d’un pêcheur montre qu’un hameçon seul est souvent insuffisant. Qu’en est-il dans le monde vivant? Eh bien, beaucoup de «pêcheurs naturels» utilisent des appâts, à croire que la voracité des poissons est un point faible facilement exploitable.

    Certains échassiers comme le bihoreau gris (Nycticorax nycticorax) ont ainsi été observés utilisant du pain comme appât. Le morceau est déposé à la surface l’eau, puis le bihoreau observe la surface en restant parfaitement immobile et lorsqu’un poisson vient à s’intéresser à cet appât il finit instantanément dans le bec du prédateur. La moule d’eau douce Lampsilis fasciola, attire également les poissons avec un appât. Il ne s’agit pas ici de prédation, mais de parasitisme. En effet les larves appelées glochidies doivent se fixer aux branchies des poissons. La moule incapable de grands déplacements, doit alors attirer l’hôte. Elle utilise pour cela une excroissance de son corps qui ondule en dehors des deux valves de la coquille, le poisson se jette dessus et se contamine alors. Ce qui est encore plus étonnant c’est que ce leurre présente une forme de poisson assez réaliste, avec une tache noire à l’avant simulant un œil, alors que le mollusque en question n’a justement pas d’yeux. Le perfectionnement du leurre s’est réalisé sur des millions de générations par sélection naturelle, les leurres les plus réussis entrainant une meilleure survie des larves parasites.

Nycticorax nycticorax

Lampsilis fasciola

    Le dernier exemple illustré ici concerne les poissons abyssaux. Ces poissons vivent dans un milieu dont le volume est immense, totalement obscur, et où les proies, mais aussi les partenaires de reproduction sont finalement assez rares. Dans ces conditions, la lumière est un moyen de communication très utile, et beaucoup de poissons (70 %) émettent des signaux lumineux, où sont attirés par de tels signaux. Les Lophiiformes, ou poissons pêcheurs, dont fait partie la baudroie abyssale représentée ici, ont même la première épine de la nageoire dorsale modifiée en un fin filament «l’illicium» (du latin illicere «amorcer») qui se termine par un leurre bioluminescent, «l’esca». La lumière résulte de l’activité des bactéries symbiotiques hébergées dans l’esca et propres à chaque espèce de poisson. Une fois la proie attirée, la gueule munie de dents monstrueuses suffit à faire le reste. Étonnamment, cette stratégie s’observe surtout chez les poissons, mais assez peu chez les prédateurs terrestres.

 

 Pour en savoir plus :

  •  Sur Lampsilis : Stephen Jay Gould, Darwin et les grandes énigmes de la vie, Ed. Seuil, 1997, 299p.
  •  Sur les abysses : Daniel Desbruyères, Les trésors des abysses, Éditions Quae, 2010, 184 p. et Claire Nouvian, Abysses, Ed. Fayard, 2006, 252 p.
  •  Sur les « ruses » : Martin Stevens, Les ruses de la nature, Ed. Buchet-Chastel, 2018, 336p.

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mardi 29 novembre 2022

Bioctobre 2019 - jour 5 : Construire

Ce billet est issu de la planche du livre Bioctobre 2018-2019, autour du mot clé "Build": Construire.
Pour en savoir plus sur le livre et se le procurer rendez-vous sur cette page : Bioctobre 2018-2019 : Le livre
 

 Planche N°XXXVI                                                                               #Build

- Construire -

En 1982, le biologiste anglais Richard Dawkins, publie « Le phénotype étendu », un ouvrage qui, à l’instar de son ouvrage précédent « Le gène égoïste » (1976), fera date en biologie évolutive. Dans cette publication, Dawkins revient sur la relation qui existe entre l’ensemble des gènes d’un organisme (le génotype) et le résultat de leur expression (le phénotype). Tiré du grec « phaínein », qui signifie « montrer », le phénotype correspond en quelque sorte à l’apparence de l’individu. Dawkins modifie l’acceptation de ce terme en montrant que le phénotype ne se limite pas à l’enveloppe corporelle des individus, mais s’applique à toutes les manifestations visibles de l’expression des gènes d’un individu. Les nombreux exemples (barrages de castors, toiles d’araignées, et nids d’oiseaux) sont des manifestations indirectes de gènes favorisant ces comportements. Lorsque l’ouvrage est bien réalisé, les individus porteurs de ces gènes sont favorisés d’un point de vue de la sélection naturelle.

L’exemple illustré ici peut être observé au nord de l’Australie à proximité de la ville de Darwin. Ça ne s’invente pas ! Il s’agit de termitières géantes mesurant jusqu’à 4 m de haut, 2,5 m de large et 1 m d’épaisseur, construites par les termites magnétiques (Amitermes meridionalis). Fait surprenant, ces termitières sont toutes orientées de la même façon, un agent immobilier parlerait « d’immeubles d’appartements traversants », orientés est-ouest. Cette orientation permet à la termitière de se réchauffer le matin, d’être peu exposé à midi lorsque le Soleil est au nord (nous sommes dans l’hémisphère Sud !), avant de repasser au Soleil le soir. Encore plus remarquable, une étude de 2002 a montré que pour établir l’orientation de leurs édifices, ces « termites boussole » utilisent le champ magnétique terrestre. Quant à la hauteur des édifices, elle permet aux termites d’éviter les inondations fréquentes dans les plaines du Nord de l’Australie. Selon les conditions de température et d’hygrométrie, les termites se déplacent dans la termitière à la recherche des conditions optimales.

Ces remarquables constructions « bioclimatiques » ne sont pas l’œuvre d’un brillant architecte, mais l’aboutissement de la coopération d’un million d’individus, issu d’un couple royal, et partageant une base génotypique commune. Chaque individu collabore ainsi au succès de sa colonie et à la transmission de ce génotype. 


Pour en savoir plus :
 

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dimanche 20 novembre 2022

Conférence à Pau, salon littéraire les "Idées mènent le Monde 2022"

 Ce week-end se tenait le salon littéraire de Pau avec des invités "prestigieux" du monde de la télévision et de la politique (généralement des amis de notre maire Bayrou) et un public dont la moyenne d'âge dépasse largement les 60 ans... Heureusement, François de Closet a bien expliqué lors de sa conférence à quel point tous ces "Boomers" ont bien pourri le système avant d'exiger maintenant que l'on prenne soin d'eux. 
Aux "idées mènent le monde" on expose également des voitures (preuve de modernité), d'une part celles des visiteurs parce que les plus de 60 ans ne vont quand même pas marcher ou prendre un vélo, mais aussi celles de sponsors qui nous montrent le monde de demain avec des SUV toujours plus gros...

Photo par l'association Pau à Vélo.

On espère qu'une prochaine édition donnera plus de place aux jeunes auteurs, qui ont également des choses à dire sur le monde de demain, même si ce qu'ils disent ne plaît pas trop aux plus de 60 ans, ou au maire de la ville de Pau. Regarder par exemple du côté de YouTube et de l'écologie serait une bonne idée.
 
 
Au milieu de ce désespoir, pour montrer que tout n'est pas perdu l'UPPA a envoyé ses meilleurs vulgarisateurs propager un message différent... Avec du contenu, plutôt qu'une accumulation de "visions du monde" inspirées par une expérience de vie privilégiée.
On apprécie le très "beau" template officiel avec des petits triangles colorés...

Bien sûr, j'ai répondu à l'appel, d'autant plus que je suis un auteur désormais ! UhUh ! Voici la conférence qui a été captée avec un public considérable (50 max) compte tenu du créneau : samedi matin 10h30. (Rappelons que le samedi matin à 10h30 les plus de 60 ans sont au marché..., j'étais par ailleurs en concurrence avec une des seules jeunes du salon: l'excellente Rachel Khan)
 
Dans cette conférence, je parle de l'histoire de l'illustration naturaliste, et des applications du dessin en biologie aujourd'hui. Le tout saupoudré de quelques planches de Bioctobre et d’anecdotes scientifiques. Les plus de 60 ans ont beaucoup aimé !

Comme il ne faut pas taper sur la main qui nous nourrit, je remercie bien sûr l'UPPA et notamment Caroline Fischer ainsi que toute l'équipe du Palais Beaumont qui m'a accueillie dans de très bonnes conditions.

Bon visionnage, et à bientôt pour des partages de speed-painting Bioctobre...