Ce
billet est une pré-publication du tome 2 de Bioctobre 2020-2021, autour
du mot clé "Rodent": Rongeur. N'hésitez pas à proposer vos remarques
et correction en commentaire !
Planche N°VI #Rodent
- Rongeur -
Si le chien est le meilleur ami de l’Homme, il n’est sans doute pas l’animal qui a le plus participé aux progrès de la science. Et pourtant les chiens ont été et sont encore parfois utilisés à des fins scientifiques. Lorsque j’étais étudiant, j’ai été choqué par la description d’expériences historiques de physiologie chez le chien au XIXe qui n’ont parfois quelques points communs avec les pratiques du Dr Frankenstein. Parmi les exemples célèbres citons également les expériences de Pavlov sur le réflexe de salivation, ou la chienne Leika morte dans l’espace…
En réalité, le chien n’est qu’une espèce modèle parmi d’autres. Une espèce modèle est une espèce utilisée en laboratoire parce qu’elle valide plusieurs critères : la facilité d’élevage que ce soit en termes de volume vital, de coût ou de reproduction. On préfère généralement un cycle de vie bref permettant d’observer plusieurs générations. Le second critère est lié aux connaissances préétablies sur l’espèce. Ainsi lorsque l’on souhaite affiner des connaissances, il est toujours plus simple de s’appuyer sur des données déjà établies chez une espèce modèle, plutôt que de repartir de zéro sur une nouvelle espèce. Enfin, le dernier critère concerne la représentativité par rapport au groupe auquel appartient l’espèce, et sa proximité avec l’espèce humaine. Chaque grand groupe biologique a donc son petit chouchou, élevé sans relâche dans les laboratoires. Chez les bactéries, on cultive très souvent Escherichia coli. Chez les plantes, ce sont majoritairement des plantes d’intérêt agronomique, mais l’on peut citer l’arabette des dames (A. thaliana). Chez les insectes, on élève la drosophile ou mouche du vinaigre. Chez les Vertébrés, le poisson-zèbre, le xénope (un crapaud d’Afrique du Sud), ou la poule sont les stars de nombreuses études. Mais l’espèce modèle la plus utilisée et qui a sans le plus contribué aux progrès scientifiques en biologie c’est la souris, Mus musculus, suivie de près par le fameux « rat de laboratoire », Rattus rattus.
La souris est un Mammifère qui coche tous les critères, en particulier concernant la reproduction : un couple peut produire entre 50 et 100 descendants par an, qui eux-mêmes commencent à se reproduire un mois et demi après leur naissance. Les estimations indiquent qu’il existe probablement 30 millions de souris en permanence dans l’ensemble des laboratoires scientifiques mondiaux, ce qui signifie évidemment que plusieurs millions sont sacrifiées chaque année. Cela est-il souhaitable, je ne crois pas, et nombreux sont les comités d’éthique qui cherchent à réduire, remplacer ou raffiner l’utilisation des modèles animaux. Imaginer que chaque souris soit remplacée par un chien permet de mieux se rendre compte de l’importance du sacrifice. Il n’empêche que la souris a indéniablement fait progresser la science avec pas moins de 31 prix Nobel et un nombre d’études incalculable. L’institut de biologie de Novossibirsk a estimé que cela valait une petite sculpture… Sans doute une façon de s’acheter à bas coût une conscience tranquille.
